La cotisation syndicale et la formule RAND

Qu’est ce que la formule Rand ?

La formule est appelée ainsi à la suite d'une décision rendue le 29 janvier 1946 par le juge Ivan Rand, de la Cour suprême du Canada, dans le cadre de l'arbitrage de la grève de Windsor (12 septembre au 20 décembre 1945). La formule Rand offre une sécurité syndicale en vertu de laquelle l'employeur prélève sur la paie de chaque salarié au sein d'une unité de négociation, qu'il soit membre ou non, une somme à titre de cotisation syndicale pour la verser au syndicat.
 
À l'origine, la formule était fondée sur le principe que le syndicat est essentiel pour tous les travailleurs et qu'il doit être responsable d'eux. Il en résultait donc deux conséquences corrélatives :
la garantie au syndicat des moyens financiers lui permettant de réaliser ses programmes et l'établissement de sanctions financières contre les employés et les syndicats recourant à des arrêts de travail ou à des grèves illégales. Une formule Rand modifiée s'est répandue partout au Canada dans les conventions collectives. Certaines provinces l'ont inscrite dans leurs lois.
 

Qu’est ce que la grève de Windsor, la grève qui a fait naître la formule Rand ?

La grève de Windsor se déroule du 12 septembre au 20 décembre 1945 à l'usine de la Ford Motor Co. à Windsor (Ontario). Le débrayage de quelque 17 000 travailleurs est la première et la plus importante d'une série de grèves qui se déroulent immédiatement après la Deuxième Guerre mondiale alors que les syndicats canadiens tentent de tirer parti des grands progrès qu'ils ont réalisés durant la guerre.
 
Cependant, la majorité des entreprises sont déterminées à limiter les gains des travailleurs syndiqués. En fait, la grève chez Ford n'a qu'un seul enjeu : la reconnaissance syndicale. Les travailleurs Unis de l’automobile (TUA) du Canada la revendiquent, mais la compagnie refuse de leur accorder. Depuis un certain temps, le syndicat fait de l'atelier syndical et du précompte syndical son mot d'ordre.
 
Des négociations étaient en cours depuis presque deux ans et de nombreuses grèves étaient survenues à l'usine durant la guerre. Avec l'aide du gouvernement provincial, la compagnie tente désespérément de briser cette grève. La police essaie en vain de traverser les lignes de piquetage. Les grévistes bloquent toutes les rues du centreville de Windsor en encerclant l'usine avec leurs voitures stationnées, fermées à clé puis abandonnées.
 
Le 13 décembre, les deux parties s'entendent pour avoir recours à l'arbitrage exécutoire du juge Ivan Rand de la Cour suprême du Canada. Dans la sentence arbitrale qu'il rend le 29 janvier 1946, ce dernier rejette la demande d'atelier syndical des TUA et condamne le syndicat et la compagnie pour leur comportement. Toutefois, et c'est là le plus important, il ordonne le précompte obligatoire des cotisations syndicales pour tous les employés de l'unité de négociation, qu'ils soient membres du syndicat ou non. Enfin, il met en place un système d'amendes, tirées à même les cotisations syndicales, qui seraient imposées au syndicat dans le cas d'une grève illégale, et calculées selon la durée de cette grève. Ce règlement d'arbitrage, connu plus tard sous le nom de FORMULE RAND, est passé dans l'usage courant de la négociation collective au Canada.