On doit tenir compte des facteurs atténuants dans le choix d’une mesure disciplinaire appropriée. L’employeur peut le faire au moment où il prend une décision concernant les mesures disciplinaires, ou le syndicat y fait référence au cours du processus de représentation.
Dans les cas de discipline, le syndicat examine habituellement deux questions. Il cherche d’abord à établir s’il y a bel et bien eu écart de conduite, ou si l’employeur peut ou non prouver que des mesures disciplinaires sont justifiées. Parfois, le syndicat peut reconnaître que la faute professionnelle d’un employé ou d’une employée constitue un motif en faveur de l’application d’une mesure disciplinaire. En deuxième lieu, le syndicat se demande si la mesure disciplinaire est appropriée dans les circonstances. Certains facteurs que nous appelons « facteurs atténuants » peuvent justifier la réduction d’une mesure disciplinaire.
Dans les cas de discipline, le fardeau de la preuve incombe à l’employeur, et la responsabilité de soulever les facteurs atténuants revient au syndicat. Ce dernier doit aussi démontrer l’existence pertinence des facteurs atténuants. Toutefois, il incombe à l’employeur de réfuter ces facteurs ou d’expliquer pourquoi ils ne devraient pas influer sur la pénalité imposée.
Les arbitres évaluent la présence ou l’absence de facteurs atténuants lorsqu’ils décident de maintenir, de réduire ou d’annuler une mesure disciplinaire. Si l’arbitre ne reçoit aucune preuve du syndicat, il n’a aucune raison de réduire la sévérité de la sanction.
Voici une liste partielle de facteurs atténuants dont pourront s’inspirer les déléguées et les délégués syndicaux.
Les facteurs les plus fréquemment cités sont la durée de service de l’employée ou de l’employé et le dossier disciplinaire. Lorsqu’un arbitre replace dans son contexte un incident relativement isolé survenu au cours d’une longue carrière sans reproche, il se peut très bien qu’il conclue que l’employée ou l’employé réagira favorablement à l’application d’une mesure disciplinaire réduite en corrigeant son comportement ou le problème qui a mené à sa mauvaise conduite.
En règle générale, on jugera plus sévèrement une mauvaise conduite intentionnelle, planifiée et préméditée qu’un simple manque de jugement, une réaction spontanée, la réponse à une provocation ou une réaction émotive impulsive.
Les arbitres ont modifié les sanctions disciplinaires lorsqu’on leur a soumis des preuves relatives à l’état d’esprit de l’employée ou de l’employé au moment de l’infraction. Mentionnons, notamment, des problèmes familiaux et affectifs, l’alcoolisme ou la dépendance au jeu, la douleur physique ou des affections physiques, ou encore, de mauvaises directives ou traitements reçus de la part du superviseur. On jugera plus favorablement les actes de fraude ou de vol s’ils s’expliquent par des motifs personnels, comme les besoins familiaux, que s’ils sont motivés par des intentions malhonnêtes dues à des habitudes criminelles invétérées.
La mauvaise conduite est-elle le résultat d’une erreur involontaire ou d’un malentendu? L’employée ou l’employé croyait peut-être qu’il ou elle avait le droit de faire les gestes en question.
La conduite de l’employeur peut être un facteur pertinent. Par exemple,existait-il une atmosphère relâchée sur les lieux de travail où une conduite semblable était tolérée par l’employeur? Les politiques et les règlements de l’employeur ont-ils été systématiquement expliqués, appliqués et mis en œuvre? Les employées et les employés qui se sont rendus coupables d’actes d’inconduite semblables ont-ils été traités avec plus d’indulgence? L’employeur a-t-il avisé les employées et les employés, de façon claire et suffisante, qu’il ne tolérerait pas une certaine conduite? Les a-t-il avisés des conséquences auxquelles ils s’exposaient s’ils ne renonçaient pas à une telle conduite?
L’attitude et les actions de l’employée ou de l’employé pendant l’enquêtesur la faute présumée influent immanquablement sur les mesures disciplinaires. L’employé ou l’employée a-t-il ou a-t-elle été honnête et direct(e)? A-t-il ou a-t-elle déclaré sa faute à l’employeur ou a-t-il ou a-t-elle tenté de la couvrir ou d’imputer injustement le blâme à une autre personne?
L’employée ou l’employé est-elle ou est-il « susceptible de se racheter »? Autrement dit, quelles sont les chances dans l’avenir qu’il ou elle se conforme à des normes de comportement acceptables et courantes? L’employé ou l’employée a-t-il ou a-t-elle admis sa faute et manifesté du remords? A-t-il ou a-t-elle présenté des excuses sincères et honnêtes, ou a-t-il ou a-t-elle offert un dédommagement quelconque? L’employeur a-t-il déjà tenté d’appliquer d’autres mesures disciplinaires correctives plus modérées auxquelles l’employée ou l’employé a répondu de façon positive en corrigeant le problème? Il se pourrait bien que les actions de l’employée ou de l’employé, entre le moment où les mesures disciplinaires sont imposées et celui de l’audience du grief ou d’arbitrage, militent fortement en faveur d’une réduction de la pénalité. Cela est particulièrement vrai dans les cas d’alcoolisme et de dépendance au jeu; la même observation peut aussi valoir dans des cas de vol ou d’agression, si l’employée ou l’employé a pris des mesures pour remédier aux problèmes sous-jacents l’ayant incité à mal agir.
La pénalité peut entraîner des difficultés financières particulières pour le ou la fonctionnaire s’estimant lésé ou lésée, tout dépendant de sa situation. Les arbitres ont invoqué ce facteur dans le cas de travailleurs et de travailleuses plus âgés, de femmes et de groupes minoritaires possédant par ailleurs de longs états de service exemplaires. On l’a également invoqué dans les situations où, si la personne était congédiée, ses perspectives d’emploi seraient limitées en raison de la nature spécialisée de son travail. On pourra dire aussi que le congédiement est une pénalité trop sévère si l’employée ou l’employé demeure dans un lieu isolé ou dans une ville où il n’y a vraiment qu’un seul employeur.
On évalue la justesse de la mesure disciplinaire en fonction de la gravité de la faute. Pour analyser la nature de la faute, on la situe en contexte en prenant les éléments suivants en compte : les responsabilités de l’employée ou de l’employé, le type d’entreprise, la question de savoir si la réputation de l’employeur en a souffert, ou si la confiance du public dans l’employeur a été ébranlée.
Lorsqu’une déléguée syndicale ou un délégué syndical examine des questions disciplinaires, il ou elle doit se rappeler que le processus de la représentation comporte un « deuxième volet » et qu’il lui faut donc s’interroger à fond sur la présence ou l’absence de facteurs atténuants.